• L'un ou l'autre

     

     

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       Je suis l'un et je suis l'autre. Pourtant, il me faudra choisir...

     

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  •    « A présent, il faut que tu choisisses. »

       Toujours la même phrase, toujours le même dilemme. Aucun échappatoire possible cette fois-ci. Je balaye la pièce du regard à la recherche d’un signe, de quoique ce soit qui puisse m’aider. Assez austère, un large bureau trônant au milieu, une bibliothèque dans un coin, des fleurs sur une étagère chargée de classeurs, quelques plantes vertes ayant pour but d’égayer l’atmosphère. Rien, pas un indice. Je suis véritablement seule.

       « Tu dois faire un choix. »

     

     

       La femme d’un certain âge qui se tient en face de moi m’adresse un sourire encourageant. Son visage, habitué à la sévérité, se creuse de rides disgracieuses autour de la bouche. Elle s’est pourtant maquillée, dissimulant assez maladroitement les imperfections dues au temps qui passe. De grosses lunettes accentuent son air aigri. Je me détourne agacée par l’impatience qu’elle affiche clairement.

       Mon regard va de mon père à ma mère. Puis de ma mère à mon père. Je suis l’un et je suis l’autre. Ils m’adressent le même sourire de réconfort mêlé d’amour et d’égoïsme : "Il n’y a que toi qui décides, ma chérie."

     

     

     

       J’en pleurerais. Au final, cela ne change rien, mais, par principe, cela fait toute la différence. Je pense à mon frère et ma sœur qui patiente dans le couloir. Que j’envie leur majorité révolue et leur indépendance ! Ils sont épargnés de "choisir ".

       Il y a seize ans, avait été coupé le cordon ombilical, cette étrange tige m’ayant influé de la vie pendant neuf mois et qui me reliait alors physiquement à ma mère. C’est extraordinaire de penser que j’étais au départ un spermatozoïde et un ovule épargné par la pilule. J’étais avant tout un petit être épargné dans l’espoir de colmater les brèches. Le subterfuge avait tenu une petite quinzaine d’années. Fierté de mes parents, comme mon frère et ma sœur avant moi, on admirait les qualités et soulignait gentiment les défauts dont j’avais hérité. J’étais choyée, peut-être un peu plus que mes ainés, fragile souvenir de la "belle époque".

     

     

     

       Comme tous parents, les miens se plaisaient à répéter sur un ton nostalgique et complice leur rencontre, leur histoire d’amour. Ma mère était une belle rousse, quelque peu aguicheuse, qui aimait la vie plus que de raison. Elle passait régulièrement ses soirées dans des clubs avec des amis. Au cours d’une de ces nuits festives, que sa silhouette féline attira l’attention de mon père. Au premier regard, la passion embrasa leurs corps et ils se promirent la lune.

       C’est ce même regard qui, jadis, brillait de désir, d’amour et de rêves, qui, aujourd’hui, se pose sur moi, terni.

     

     

    Nüwa

     

     

        « Tu sais, ma chérie, le temps a passé… Papa et maman ne s’aiment plus. Cela ne changera rien pour toi. Tu passeras une semaine chez l’un et une semaine chez l’autre… »

     

    [Il faut juste que tu choisisses ton lieu de résidence.]

    FIN


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