• Juste un regard

    Juste un regard

     

      

     

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    « Coincée au lit par cette saleté d’angine et avec, pour amère compagnie, cette obsession. J’ai quarante degrés de fièvre, le front en sueur mais je ne délire pas. Je ne suis ni parano, ni amoureuse, juste accro. »

     

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       Coincée au lit par cette saleté d’angine et avec, pour amère compagnie, cette obsession. J’ai quarante degrés de fièvre, le front en sueur mais je ne délire pas. Je ne suis ni parano, ni amoureuse, juste accro.

       Comment un simple mal de gorge matinal se transforme-t-il en un stupide virus ? Good question… Le médecin a diagnostiqué un chaud et froid. Je suis convaincue d’avoir fait une overdose. La meilleure solution serait-elle de faire une cure ? D’oublier ? L’oublier ? ¿ Olvidarle ? To forget him ? Ihn vergessen ? Dimenticarlo ? Забудьте его ? 彼を忘れてください? לשכוח את זה? 忘记他 ? …

     

     

       Lui ou son regard ? That is the question.

       Lui, mon opposé, mon antonyme, ou presque. Un immense no man’s land nous sépare : toute la cour, toute une physionomie. CAP DECG première année, pull à capuche, mains dans les poches, chapeau sur le crâne, j’ignore tout de lui, même son nom. Série scientifique première année, écharpe jaune, veste noire gentiment nouée, légèrement cambrée, je passe la plupart de mon temps à bosser au CDI. Bref… Vous voyez un lien ? A priori aucun.

     

     

       Son regard, si profond, si noir. Le seul, l’unique, qui a su aimanter l’émeraude de mes iris, qui a su se mesurer à leur insolence. Couleur pure café, couleur cacao en poudre 99%, couleur… Il m’obsède, c’est comme une drogue. Lorsque je désire arrêter cet étrange manège, je n’ai pas la volonté. Lorsque j’ai la volonté, je désire continuer.

       C’est une histoire de fou qui a rapidement dégénéré. J’ai peu à peu réglé mes déplacements de façon à le croiser le plus souvent possible : au self, dans les couloirs,… Imperceptiblement, je suis devenue accro, accro à un regard. C’est devenu vital, inexplicable, incohérent. De plus en plus nerveuse, mon cœur s’emballant pour un rien, il fut temps de mettre un terme à cette stupide obsession.

       Plus facile à dire qu’à faire. Mon cœur se déchire toujours entre la tentation de le voir et celle de l’oublier.

     

     

       Assise dans les herbes folles au fond du jardin, j’ai confectionné des colliers de pâquerettes. Ailleurs. Tout le week-end, j’ai réfléchi à un remède, invoqué tous les dieux et pleuré assez de larmes pour que la nature reverdisse. En vain. Cependant, j’y ai cru, j’ai cru que je pouvais m’en sortir, l’oublier, le olvidar, to forget him,… J’ai espéré toute la semaine, indifférente et à nouveau moi-même. Puis il a fallu d’un instant, un instant plongé dans son regard, un matin d’hiver. Mes nerfs n’ont pas supporté. Des sueurs, une migraine et je me retrouve dans mon lit.

     

     

       Je sais que cette histoire ne rime à rien, j’en suis parfaitement consciente. A présent, je ne désire qu’une seule chose : le hanter autant qu’il me hante.

       Parfois, je repense à ce test stupide que la majorité des filles font le 31 août : que va-t-il t’arriver le jour de la rentrée ? Si j’avais su que j’allais devenir addicted à un regard, j’aurais gardé les yeux rivés sur les graviers de la cour…

     

     

     

    FIN


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